29 janvier 2012
Abderrahmane Zenati : le vent de l'Est s'arrête à Figuig
EXTRAIT
"J’étais à Oujda pour un reportage sur la vie économique de cette région. Il faisait beau. C’était l’après midi. Le ciel était bleu et le soleil inondait de sa lumière le ravissant paysage. Installée sous les palmiers à la terrasse d’un café, j’observais un peintre qui avait campé son chevalet à quelques pas devant moi. L’artiste devait avoir une trentaine d’année. Il avait les yeux profonds d’un poète et le menton rond et ferme d’un homme viril. Tout en lui était beau, affiné, expressif, embrasé d’esprit et de vie intérieure. Il portait un blue-jean, un pull-over et des espadrilles. Subjuguée de le voir peindre, je m’approchai de lui afin de jeter un coup d’œil à la toile. Quelques instants s’écoulèrent. Le peintre continuait à travailler, indiffèrent semblait-il de ma présence à ses côtés. Il était de grande taille et avait un visage laid, mais distingué, énergique et original, au teint basané. Un certain air de négligence lui donnait beaucoup de charme.
J’étais sûre que ce n’était pas un Oujdi. Autrement je ne lui aurais jamais adressé la parole.
— Vous avez bien rendu la teinte de la montagne … bravo, lui dis-je.
— Quand le soleil leur tape dessus comme en ce moment, elles ont des couleurs sublimes, dit-il sans me regarder.
Sa voix était laide et vulgaire, mais possédait cependant une sorte de charme envoûtant.
— J’aime bien aussi votre ciel et vos arbres qui se reflètent dans l’eau…
— Ce n’est en somme que du bleu et du vert, mais la lumière sur les montagnes, c’est autre chose… Vous savez, ce coin Oujda vaut mieux que l’Italie où l’Espagne… Cette lumière c’est de l’or.
La conversation se poursuivit, l’artiste semblait heureux de l’admiration d’une inconnue. Soudain, il tourna sa tête vers moi et s’écria :
— Tiens, mais c’est Maha ! … Quelle surprise ! … Dis donc, cela fait longtemps, Maha…
Et aussitôt, il me fit la bise en me serrant contre lui. Un parfum lourd : sueur et parfum bon marché, conjugués, émanaient de sa peau tiède.
—Excusez-moi, monsieur, lui dis-je en me dégageant de son étreinte. Je ne suis pas Maha ! …
Le visage de l’artiste s’empourpra de confusion.
— Oh, Pardon ! Excusez-moi, bégaya-t-il en me regardant attentivement. Je vous ai pris pour Maha… une jeune femme que j’ai connue autrefois… C’est fou ce que vous lui ressembler… J’aurais juré que c’était bien vous, Maha …"
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